Journée internationale pour la conservation de l’écosystème des mangroves | 26 juillet 2023

Journée internationale pour la conservation de l’écosystème des mangroves | 26 juillet 2023

Mme Olfa SEHLI

Olfa SEHLI
Biologiste et écologiste Marine 
Observatoire du Sahara et du Sahel

Bonjour, c’est moi la mangrove,
Beaucoup pensent que je ne suis qu'une forêt aux racines visibles, alors qu'en réalité je suis le lien de vie entre la terre et la mer. Particulièrement abondante en Asie, suivie de l'Afrique et de l'Amérique du Sud, j’abrite environ 70 espèces d'arbres et d'arbustes uniques tolérants au sel, que l'on trouve le long des côtes tropicales et subtropicales.

Aujourd'hui et comme tous les 26 juillet, le monde célèbre la Journée internationale pour la conservation de l'écosystème des mangroves, adoptée par la Conférence générale de l'UNESCO en 2015. Cette journée est célébrée pour rappeler que je suis un écosystème important, unique, mais vulnérable et pour essayer de trouver des solutions pour gérer, conserver et mieux utiliser mes ressources.

Vous vous demandez peut-être pourquoi la Conférence générale de l'UNESCO réserve une journée en mon honneur ? Qu’ai-je de si spécial pour mériter cette reconnaissance ?

Mes racines ramifiées, caractéristiques et uniques, qui poussent parfois au-dessus du sol, sont la partie la plus importante de ma structure. Ce sont elles qui m'aident à m'adapter à mon environnement, elles sont mon point d'ancrage et mon moyen d’absorber autant d'oxygène que nécessaire. 
Elles sont à la base des nombreux services écosystémiques que je fournis. D’ailleurs, on me nomme « Garde côtière » parce que mon système racinaire fonctionne comme un bouclier naturel qui agit contre l'érosion en réduisant l'impact des vagues et des tempêtes et en protégeant la terre de tout danger océanique dévastateur.

On m’appelle aussi "Pépinière de l'océan" en raison du nombre élevé d'espèces qui dépendent des habitats fournis par mes racines pour se nourrir et se réfugier durant leurs stades larvaires.

Et devinez quoi ! vous aussi, vous avez besoin de moi ! J'ai même entendu dire que plus de 210 millions de personnes se sont installées autour de moi et bénéficient des ressources halieutiques que je fournis. C’est comme ça que je contribue à leurs économies locales et que j’assure leurs moyens de subsistance.

En plus d’être une solution basée sur la nature qui aide à atténuer les effets du changement climatique, je filtre l'eau en captant les sédiments et en absorbant l’excès de nutriments.

En Afrique, la surface côtière que je couvre s’élève à plus de 3,2 millions d'hectares, soit 19% du total mondial. Les mangroves en Afrique se trouvent principalement sur la côte ouest de l'Atlantique ; le Nigeria ayant les forêts de mangroves les plus étendues d'Afrique.

En effet, je joue un rôle essentiel dans la pêche côtière en Afrique de l'Ouest, où cette activité contribue à hauteur de 400 millions de dollars par an à l'économie régionale. De plus, les communautés ont besoin de moi pour le bois de chauffage qui sert à sécher le poisson, le bois et d'autres matériaux de construction ainsi que des produits comme les escargots, le miel, les huîtres, les crabes et les médicaments traditionnels. Selon une étude menée dans la côte ouest africaine, la conchyliculture active est pratiquée dans une grande partie de mon écosystème avec près de 571 000 ménages bénéficiaires et plus de 50 000 pêcheurs, principalement des femmes, sont les principaux utilisateurs des ressources. Ils récoltent plus de 300 000 MT de coquillages qui rapportent près de 336 millions de dollars.  

Malheureusement, malgré toute l'importance et les multiples services écosystémiques que je fournis, je suis fortement menacée par l'exploitation frénétique de mes ressources naturelles, perpétrée par les mêmes personnes que je soutiens. L'urbanisation rapide et la demande croissante en terres, en bois de chauffage et en charbon contribuent grandement à cette menace, qui est encore exacerbée par les effets du changement climatique.

Aujourd’hui, je suis désolée de vous annoncer que les 30 % que j’ai perdus de mon écosystème en Afrique au cours des 25 dernières années, seront lourds de conséquences, car contrairement à vous, je suis suffisamment résiliente. C’est pourquoi je vous conseille de ne pas nous prendre, nous les mangroves, pour acquises, et de rationnaliser l’utilisation de nos ressources en cherchant les solutions propices à notre conservation avant qu'il ne soit trop tard.

Dans ce contexte, et à travers le projet « Adaptation des systèmes de production agricole dans les zones côtières du nord-ouest de la Guinée-Bissau », le Fonds Vert pour le Climat (GCF) et l'Observatoire du Sahara et du Sahel visent à restaurer 250 hectares de mangroves, à protéger les communautés côtières, à réhabiliter les écosystèmes des zones humides et à améliorer la résilience des riziculteurs des mangroves.

Chuku, E. O., Effah, E., Adotey, J., Abrokwah, S., Adade, R., Okyere, I., ... & Crawford, B. (2022). Spotlighting women-led fisheries livelihoods toward sustainable coastal governance: The estuarine and mangrove ecosystem shellfisheries of West Africa. Frontiers in Marine Science, 9, 884715. 

Hutchison, J; Spalding, M, and zu Ermgassen, P (2014) The Role of Mangroves in Fisheries Enhancement. The Nature Conservancy and Wetlands International. 54 pages.